De la cinématique du combat

Je vous entends déjà râler ici et là. Du style « le combat dans Savage Worlds c’est comme dans D&D, on attaque jusqu’à ce que le monstre tombe ». Eh bien en fait non, je pense que le problème vient en fait des habitudes. Dans la plupart des jeux connus, les options autres qu’une attaque (ou équivalent) n’ont pas un effet déterminant. Ce n’est pas le cas dans Savage Worlds même si la souplesse du système peut ne pas apparaitre au premier abord.

Cet article est basé sur l’article Whispers from the Pit #3 écrit par Paul Wiggy.

Avant tout, je me permets de revenir sur le Guide de Survie en Combat. C’est un excellent guide qui couvre une grande variété de situations de combat, et qui fournit aux joueurs d’excellentes informations sur les actions possibles pour déméler une situation compliquée. Le MJ devrait mettre sous le nez de chacun de ses joueurs ce guide, et s’assurer qu’ils le comprennent. Prenez quelques minutes pour répondre à d’éventuelles questions, à faire de courtes pauses pour expliquer une règle se rapportant à ce guilde, voire faites en un poster et affichez-le sur le mur si nécessaire !

Une autre approche, complémentaire, consiste pour le MJ à se servir massivement des manœuvres en combat contre les joueurs. De cette manière, ces derniers constateront l’efficacité de ces tactiques et y viendront naturellement. Si votre orque utilise une Attaque Sauvage, un Coup Visé ou une manœuvre de désarmement avec succès, alors les joueurs finiront par y venir !

De la cinématique du combat

Une attaque qui porte mais pas de dégâts ?

OK, cherchons à caractériser le problème : nous sommes nombreux à avoir joué à des jeux populaires et classiques, dont bien entendu D&D. Hors, il s’agit de jeux dits à points de vie. Les joueurs ont l’habitude de tirer les dégâts qu’ils infligent à la suite de toute attaque réussie et d’en voir les résultats sur le champ. A l’exception que quelques rares capacités spéciales, les combats deviennent une histoire d’attaque réussies et de dégâts, où finalement la tactique et les diverses manoeuvres n’ont que peu d’impact.

C’est une des différences principales du Système Savage Worlds par rapport à D&D : l’armure ne rend pas plus difficile à toucher, mais simplement plus difficile à blesser. C’est une différence majeure. Prenons l’exemple d’un dragon : sa Parade est de 6, mais les attaquants bénéficient d’un bonus de +4 à cause sa taille. Toucher la créature ne devrait pas être un problème. Même un personnage complètement inculte en matière de combat tire 1d4+2. Malgré celà, le dragon demeure un adversaire redoutable, car sa Résistance est de 20 ! C’est pour cela que, contrairement à d’autres jeux, les personnage toucheront sûrement très souvent le dragon, mais les blessures seront rares. C’est là que le MJ intervient. Le concept « je touche, mais je ne fais pas de dégâts » peut surprendre un joueur de D&D. Avec une petite description au lieu de quelques termes techniques, il comprendra rapidement la différence.

Une attaque qui porte n’a pas d’effets en terme de jeu, certes, mais elle a quand même un effet. Le dragon ne saigne pas comme dans D&D où l’on voit les points de vie baisser, mais au final, ce n’est qu’à la fin du combat que les coups ont un réel intéret. Dans Savage Worlds c’est au MJ de donner l’impression aux joueurs que leurs coups ne sont pas de simples « tu touches, mais pas de dégâts ». Par exemple, dire « Ton coup fait sauter quelques écailles de la cuirasse de la créature », « Le dragon se cabre, comme piqué par ton coup d’épée » ou encore « Le dragon tourne vers toi sa tête et te darde d’un regard furieux » change complètement la vision du combat dans l’imaginaire des joueurs.

Quand une attaque cause une blessure, décrivez-le également. Ne vous contentez pas de noter quelques données sur une feuille de papier ou de quelques termes techniques. Décrivez le hurlement de douleur, le sang qui gicle ou l’adversaire qui accuse le coup. De cette manière vous immergez les joueurs dans le combat.

Pour en revenir au Guide de Survie en Combat, Savage Worlds offre aux personnage à la fois des manoeuvres et des Atouts à utiliser en combat.Les manoeuvres ne sont pas dans les règles pour juste prendre un peu de place, mais surtout parce que Savage Worlds est un jeu où la tactique utilisée contre ses adversaires est plus importante que de les frapper encore et encore jusqu’à la mort. Bien sûr il vous sera toujours possible de tuer un orc en un coup, mais pour un dragon, il faudra s’y mettre pour de vrai – et quelque part, c’est bien normal. Les Attaques Sauvages augmentent vos chances de toucher et les dégâts occasionés. Les Coups Visés permettent explicitement d’ignorer l’armure de la créature.

Quant à l’aspect cinématique, nous l’avons déjà abordé. La charge incombe tout d’abord au MJ de décrire les attaques des créatures sous son contrôle, et il devrait encourager ses joueurs à faire de même. Remplacer simplement « j’attaque » par « je lui ouvre le ventre », si tout le monde se prête au jeu, peut radicalement changer l’ambiance autour de la table.

De la cinématique du combat

Les Ruses, c’est essentiel.

Les Ruses sont, à mon sens, une des plus intéressantes mécaniques du système Savage Worlds. Avec une mécanique unique et élégante, il est possible à la fois de tirer le tapis sous les pieds d’un adversaire ou de le troubler en dégrafant son corsage. Dans le cadre d’un combat qu’on souhaite vivant, ils doivent être utilisés au maximum. Le MJ devrait même à l’occasion modifier le résultat de la Ruse en fonction de la situation. Si un personnage tire violement un tapis sous les pieds d’un orque par exemple, ce dernier devra probablement tomber, même si ce n’est pas spécifié dans les règles sur les Ruses.

Dans le cas des résultats des Ruses, laissez également tomber le technique. Inutile de dire au joueur « Ok, ça marche. L’orque a un malus de parade jusqu’à sa prochaine action ». Essayez plutôt quelque chose du style « L’orque jure dans sa langue gutturale, essuyant frénétiquement le sang qui lui coule dans les yeux. tu vois une ouverture dans ses défenses. ». N’oubliez pas, le cinéma, c’est l’art de montrer aux spectateurs ce qui se passe. Pour un combat cinématique, vous devez décrire les actions, pas les termes techniques.

De la cinématique du combat

Les Atouts aussi font du cinéma

Bien sûr, il ne faut pas tomber dans l’excès inverse. Si un héros est bloqué dans un coin par trois orques, et déclare qu’il veut courir sur le mur, utilisant l’appui qu’il a pour frapper les trois orques, c’est l’exacte description de l’Atout Balayage, et le personnage ne pourra réaliser cette action s’il ne possède pas l’Atout. Ce qui nous amène aux descriptions des actions découlant d’Atouts.

Un héros peut utiliser l’Atout Balayage en disant « j’utilise Balayage ». Wow, trop bien. fonctionnel, mais quelle platitude ! Pourquoi pas plutôt « je tombe à genou, faisant tourner ma lame autour de moi à hauteur de leurs genoux ». Même chose pour Frénésie. Ce n’est pas juste « j’attaque deux fois », mais plutôt « Je le roue de coups » ou « je lui découpe les entrailles et j’enchaine par un coup de taille à la tête ». Enfin vous voyez le tableau.

Voilà en gros pour ce qui est des combats cinématiques : tout n’est qu’histoire de description. Plus chaque aspect technique sera gommé par une description vivante, plus le combat sera dynamique et la scène d’anthologie.

Essayez à l’occasion, la différence est flagrante.

Bon jeu !

Une belle illustration (en anglais) du texte ci-dessus.

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